Le pouvoir a-t-il un sens ? (5)

Publié le par Jean Dornac

Nous avons vu, au travers de quelques exemples, avec l’article 4, que l’exercice du pouvoir actuel, en France et dans quelques autres pays, n’a, logiquement, rien à voir avec la légitimité morale lue avec le support du « droit moral ».

Qui dit pouvoir moralement illégitime, qui dit encore exercice du pouvoir moralement illégitime, dit aussi son corollaire inévitable : « A pouvoir illégitime, résistance légitime. »

Légitimité de la résistance

Bien entendu, aucun tenant du pouvoir, aucun politicien appartenant à un parti dit « à vocation majoritaire » n’acceptera de reconnaître que notre résistance est légitime. Pas plus qu’il ne pourrait ni ne voudrait reconnaître que son pouvoir, celui qu’il sert et dont il se sert, est illégitime. Il brandira toujours les « tables de la loi », religieuses dans le passé, républicaines aujourd’hui.

Mais, pour un esprit subversif, c’est-à-dire un esprit libre, autrement dit un esprit qui cherche le renversement, même de manière non-violente, de l’ordre social ou politique, l’illégitimité du pouvoir est évidente et ce pouvoir ne peut qu’être combattu pour être remplacé ou, mieux, lorsque les peuples seront mûrs, pour s’en passer enfin et définitivement.

Justification de la légitimité de la résistance face aux pouvoirs illégitimes

1) Même si je me répète, mais qu’importe compte tenu de l’importance de cet élément, la première justification c’est que tout homme est égal en dignité et en importance à tout autre. Pour moi, c’est le fondement même de l’essentiel de ma pensée. Ce fondement est la base de ma révolte, de mon combat non-violent. Parce que j’ai la certitude de cette égalité absolue entre chaque humain vivant sur terre, femme comme homme, toutes cultures confondues, toutes religions ou non-religions confondues, tous âges confondus, je n’accepte pas et n’accepterai plus jamais qu’un groupe d’humains, qu’il soit riche ou cultivé plus que la moyenne, se prétende supérieur. C’est une fumisterie de taille !

Les élites se considérant obligatoirement supérieures aux peuples, se permettront toujours, comme nous l’avons entrevu dans l’article 4, d’abuser le peuple, de le spolier, de créer des lois iniques. Il est d’ailleurs, à cet égard, frappant de constater à quel point les lois n’ont pas le même sens et la même valeur selon qu’on est issu du peuple ou de la prétendue élite. Il suffit de suivre quelques jugements, au tribunal, pour s’apercevoir que nombre de lois sont appliquées avec rigueur, dès qu’il s’agit du monde des pauvres et combien ces mêmes lois épargnent les puissants, pour des faits bien plus graves. Il en va de même pour les impôts et tant d’autres choses rattachées au droit qui se sont transformés en privilèges de caste. On ne peut plus espérer revenir en arrière sans une véritable révolution. Mais attention, révolution ne veut pas dire forcément violences.

On le voit depuis une bonne trentaine d’années, en France, en Angleterre, en Allemagne, aux USA comme ailleurs, les peuples peuvent voter pour n’importe quel parti politique « à vocation majoritaire », rien ne change. C’est toujours la même pression qui est exercée sur les citoyens, et rien que sur eux. Nous avons atteint un point de non-retour, tant que ce type de parti politique monopolisera le pouvoir. Pour espérer un vrai changement, il faut obligatoirement donner libre cours à un parti n’appartenant pas à ce courant livré aux puissants du « marché mondial et financier » tout en s’interdisant d’élire un parti qui serait xénophobe, raciste, prétendant que ses membres ou le peuple sont supérieurs aux autres hommes, aux étrangers. Même si ces partis étaient, à la limite, susceptibles d’améliorer les conditions de vie du peuple, ce que je ne crois pas, ils poursuivraient, par d’autres moyens, la même politique de destruction ou d’empêchement de la cohésion humaine au niveau mondial. Et ce serait aussi tragique que nos malheurs actuels.

2) L’autre justification est forte également puisqu’elle est la réponse obligatoire à l’illégitimité du pouvoir. Il faut, parce que nous sommes des humains debout et non pas des esclaves couchés, résister, refuser le fait accompli. Toute démission, dans ces domaines, fait de nous des esclaves. Et nous le voyons très fortement, en France. Chaque été, le peuple, légitimement, c’est vrai, prend ses vacances, oublie la politique et les politiciens retors. Mais les politiciens, eux, n’oublient pas de satisfaire leurs ambitions au travers de l’augmentation continuelle de leurs privilèges ou des privilèges de ceux qui, seuls, justifient encore leurs actions, c’est-à-dire le monde industriel et financier, les grands patrons pour simplifier. C’est ainsi que, ces dernières années, nous avons vu, successivement, en l’absence du peuple qui se reposait, la destruction du système des retraites ; la destruction de la protection sociale ; et un coup mortel contre le droit du travail. Par ces destructions, pour lesquelles le pouvoir actuel n’a jamais reçu mandat du peuple, nous voyons à quel point ce pouvoir français est illégitime et ne fait de la politique que pour l’intérêt de ses commanditaires riches et puissants et cela au détriment de plus en plus sévère des citoyens.

L’intérêt et la volonté du peuple, proclamé « souverain » par la Constitution du pays, sont le partage des richesses entre tous, le droit de vivre libre pour tous, le droit à la culture pour tous, la santé pour tous, le logement pour tous, le droit à une vie privée, autrement dit l’application réelle, effective, des droits de l’homme conçus et voulus par nos ancêtres révolutionnaires. L’intérêt et la volonté du pouvoir, qui n’est pas proclamé « souverain » dans la Constitution, sont l’accaparement des richesses du pays au seul bénéfice de petites castes déjà bien trop riches et puissantes. Et cela se concrétise par la négation de fait des droits de l’homme.

Il est donc non seulement légitime mais encore nécessaire que les peuples, en particulier ses membres les plus conscients quant aux réalités du pouvoir, se lèvent et résistent afin de reprendre, à ceux qui ont rétabli des privilèges dignes des temps féodaux, la souveraineté et de la rendre au peuple, seul détenteur légitime. Le peuple, ici, en France, doit se soulever s’il veut à nouveau vivre dignement, vivre le partage entre tous et prendre le chemin de l’âge adulte qui tarde tant...

Les conditions d’une résistance puissante et efficace

Je n’aurai pas la prétention d’affirmer que je connais toutes les clefs d’une telle résistance. Mais avant d’arriver aux méthodes possibles de résistance, il faut quelques conditions sans lesquelles nous échouerons d’office.

Ce que je vais affirmer semblera être une évidence à beaucoup d’entre vous. Cependant, dans cette époque de banalisation des mots pour désarmer leur puissance, pour les anesthésier, en quelque sorte, je dirais, et avec force, que la première de toutes les conditions d’une résistance efficace et qui ait du sens, c’est la prise de conscience.

Nulle résistance, nulle révolte n’est possible sans la prise de conscience préalable. Il faut en effet prendre conscience que le type de société actuel nous conduit à l’affrontement des civilisations, nous conduit à la mort de l’écosystème, à la mort de toute vie, y compris celle des hommes. Sans cette prise de conscience essentielle, il n’est pas possible de comprendre que le combat à entreprendre est le combat pour la survie des générations d’humains à venir. Ce combat, pris dans ces termes, compris de cette façon, la plus haute, la plus noble, nous devons le mener, nous, humains de ce début du XXIème siècle, parce que nous sommes ceux qui, le plus souvent, avons favorisé la mise en place du système actuel, ou parce que nous l’avons laissé s’installer ou encore parce que, sous une forme ou une autre, nous en avons été complices, même de façon tout à fait inconsciente. Il est, par conséquent, de notre devoir d’entreprendre la renaissance d’une société nettement plus humble dans ses besoins, dans ses objectifs ; nettement plus fraternelle par le partage véritable des ressources naturelles et des richesses produites par tous.

Mais si nous ne prenons pas conscience de la réalité de la situation dramatique du monde, du peu de temps qui nous reste pour sauver ce qui demeure de vie intacte sur cette terre ; si nous refusons de prendre conscience de la gravité de la situation terrestre et de la responsabilité totale des pouvoirs abusifs et illégitimes, alors toute résistance est vaine. A l’heure actuelle, et je ne pense pas trahir leurs pensées, des associations comme Attac, des hommes comme José Bové, et plus modestement des gens comme moi, nous en sommes surtout à la phase du travail nécessaire pour amener au plus grand nombre les éléments nécessaires à la prise de conscience. Non pas que nous serions plus intelligents que d’autres, mais souvent parce que des événements de nos vies ont déclenché, en nous, cette prise de conscience qui se fait rarement toute seule. Il faut bien réaliser que pour beaucoup de ceux qui résistent déjà, et ce fut mon cas, ce qui a déclenché la prise de conscience c’est d’être jeté au chômage. Cette prise de conscience ne s’est pas faite du jour au lendemain, c’est un travail relativement long, il faut déjà remonter la pente après le choc... Malgré tout, pour ceux qui parviennent à sortir de cette « destruction programmée », le chômage devient un terrible révélateur. Du coup, et c’est le revers de la médaille pour les destructeurs de l’emploi, ils fabriquent eux-mêmes l’antidote au poison qu’ils diffusent dans la société. Ils ne pensaient assurément pas qu’au travers du mal profond, d’une souffrance étouffante, qu’ils imposent à leurs millions de victimes, ils allaient parallèlement réveiller notre conscience. Ils font tout, par ailleurs, au travers de la consommation, des médias, de la publicité pour endormir le plus parfaitement nos consciences. Notre chance, c’est la puissance de leur égoïsme et de leur orgueil. Ils n’ont toujours pas compris que plus ils créeront de pauvreté et d’exclusion, plus ils gonfleront les rangs des résistants par le puissant réveil de la conscience qu’ils induisent avec leur cruauté.

La deuxième condition, tout aussi importante, c’est de parvenir à abolir, en nous-même, la peur. Rien ne peut se faire sous l’emprise de la peur. Il n’y a pas, je crois, de recette précise pour trouver le courage et abandonner la peur. L’un des moyens, cependant, c’est d’arrêter d’accueillir volontairement cette peur, en nous mettant devant l’écran de la télévision, le soir à 20 heures. Ces journaux sont devenus des usines à diffuser la peur, surtout les peurs qui n’ont aucun sens, comme le terrorisme, l’insécurité. Devant les images, les commentaires, si l’on n’a pas d’autres sources sérieuses d’informations, comment éviter de prendre peur ? C’est un poison qui est injecté depuis des années dans les cerveaux des téléspectateurs, en particulier depuis septembre 2001. Et ce poison est mortel pour ceux qui n’en ont pas pris conscience ou qui refusent de comprendre par confort et habitude.

Je suis frappé de voir certaines personnes avoir visiblement peur, pendant que je me sens, moi, en parfaite sécurité. Parfaite, à un détail près, néanmoins : le déferlement des policiers qui jouent à « Rambo ». Là, je ne me sens pas en sécurité, non pas que j’aie quoi que ce soit à me reprocher, mais parce que des gars qui roulent les mécaniques et qui de surcroît sont armés, sont par définition potentiellement dangereux. En outre, l’excès de présence policière, donne un sentiment de pays occupé, d’absence de liberté.

La troisième condition tombe sous le sens. C’est de ne pas rester seuls. Aucune résistance n’est possible et surtout efficace lorsqu’on est isolé. Internet, à cet égard, est un formidable outil pour prendre des contacts, pour appartenir à un réseau comme pour diffuser les informations. Il ne faut pas hésiter à créer des liens. Peu à peu, même si au début tout cela semble être virtuel, des groupes se forment et l’on rencontre ceux qui sont prêts à résister...

Un grand pas sera fait si nous parvenons à réaliser ces trois points. Désormais, il faut passer aux actes. La grande question sera alors : Résistance violente ou non-violente. Ceux qui me connaissent savent déjà quel est mon choix, celui que je privilégie.

à suivre

Publié dans Le pouvoir et nous...

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C
Sans culpabilité simple réalité<br /> Ne suffit pas d'y croire, juste regarder pour voir<br /> Qu'au delà des insultes ne signe pas adulte<br /> Et plutôt que coupable, se montrer responsable
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C
Jusqu'à ce que le bourreau finisse par réaliser qu'il est victime de son égo <br /> <br /> Ce que la vie ne manquera pas de lui apprendre <br /> Avant que de comprendre <br /> Que ce qu'il a semé <br /> Il le verra pousser <br /> Devant s'en arranger<br /> Afin de progresser<br /> Vers un monde apaisé<br /> Possible à partager
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C
Et ceci ne se veut être qu'un "comment taire" "l'élement terre" <br /> qui finit toujours par dire le dernier mot <br /> pour qui agit comme un idiot<br /> <br /> Merci Jean du cheminement au pays des non violents<br /> <br /> Catherine.
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J
<br /> Chère Catherine,<br /> <br /> Ce cheminement en terre de non-vilonce est particulièrement rude. J'en fais l'expérience, actuellement, dans ma vie privée... Oui, ce n'est pas un cheminement facile, mais oh combien il est<br /> préférable à la violence qui, elle, est toujours facile à exercer, mais destructrice autant de la victime que du bourreau...<br /> <br /> <br />
C
Au regard du respect actuel de l'état des droits de l'homme, de la femme et de l'enfant<br /> <br /> Il est un devoir de voir<br /> <br /> Bon jour pour tous,<br /> <br /> Catherine.
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